Patrick Fiori
Les blessures de son âge
J’ouvre les yeux pour la première fois
L’air dans mes poumons me foudroie
Mais il y a la chaleur de cette voix
Là, maman, tout près de moi
J’ai 6 ans, je me suis fait mal au cœur
Je pleure sur les genoux de mes sœurs
Elles me consolent et me disent :
« Regarde en l’air
Elle est partie par là, notre grand-mère. »
Maman me dit que toutes ces peines
Ce sont des plumes pour nos ailes
On a les blessures de son âge
Égratignures, jolis tatouages
Autant d’histoires qu’il reste
À vivre comme un jeu
Un amour d’été à la plage
Qui s’évapore dans les nuages
Qui laisse pour toujours, un peu
De brume dans nos yeux
Ah… J’ai 10 ans et des poussières
L’institutrice n’sait plus quoi faire de moi
Elle me dit d’aller prendre l’air
Moi j’ai pris l’air
Et j’ai chanté un peu trop fort, je crois
J’ai 18 ans, j’suis tête en l’air
J’comprends dans les yeux de Lola
Qu’elle ne voudra jamais, jamais de moi
Alors j’ai chanté
Plus haut qu’la dernière fois
Maman dit que les amours qui partent
Sont une corde de plus à mon harpe
On a les blessures de son âge
Journal intime dont les pages
Nous font couler le maquillage
Au coin des yeux
On est grand sans en avoir l’âge
Et on nous demande d’être sage
Jacques a dit qu’on peut être adulte
Sans être vieux
J’ai 32 ans, je bosse sans trêve
Les factures ont éteint mes rêves
La lune s’est bien moquée de moi
La La La !
J’habite juste en face de Lola
J’ai à peine 50 ans, ce soir
Et des enfants dans le miroir
Ce portrait, je n’y croyais plus !
Lola a traversé ma rue
Maman me dit que le temps qui passe
Remet chaque chose à sa place
On a les blessures de son âge
Quelques rides sur le visage
Autant d’histoires, de marque-pages
Au coin des yeux
Des cheveux blancs dans les feuillages
Des souvenirs de nos voyages
Des p’tits bonheurs qui mettent
Un peu d’eau dans nos yeux
Dans nos yeux…
Dans nos yeux…
Dans nos yeux…
Dans nos yeux…
J’ouvre les yeux pour la première fois
L’air dans mes poumons me foudroie
Mais il y a la chaleur de cette voix
Là, maman, tout près de moi